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Certes est hors d'atteinte la perfection. Elle n'a d'autre sens que celui d'étoile pour guider ta marche. Elle est direction et tendance vers. Mais la marche compte seule et il n'est point de provisions au sein desquelles tu te puisses asseoir. Car alors meurt le champ de force qui seul t'anime et te voilà comme un cadavre.

Et si quelqu'un néglige l'étoile c'est qu'il veut s'asseoir et dormir. Et où t'assois-tu? Et où dors-tu? Je ne connais point de lieu de repos. Car tel lieu s'il t'exalte c'est qu'il est un objet de ta victoire. Mais autre est le champ de bataille où tu respires cette victoire neuve, autre cette litière que tu en fais quand tu prétends en vivre.

A quelle œuvre témoin compares-tu la tienne pour t'en satisfaire?


Car tu t'étonnes du pouvoir de mes rites ou de mon chemin de campagne. Et t'étonnant tu es aveugle.

Observe le sculpteur, il porte en lui quelque chose d'inénonçable. Car n'est jamais énonçable ce qui est de l'homme et non du squelette d'un homme passé. Et le sculpteur pétrit pour le transporter un visage de glaise.

Or donc tu cheminais et tu es passé devant son œuvre et tu as regardé ce visage peut-être arrogant ou peut-être mélancolique, puis tu as continué ton chemin. Et voici que tu n'étais plus le même. Faiblement converti, mais converti, c'est-à-dire tourné et penché dans une nouvelle direction, pour un temps court peut-être, mais pour un temps.

Un homme donc éprouvait un sentiment informula-ble: il a donné quelques coups de pouce dans la glaise. Il a placé sa glaise sur ton chemin. Et te voilà chargé, si tu empruntes cette route, du même sentiment informu-lable.

Et cela même s'il s'est écoulé cent mille années entre son geste et ton passage.


CLVI


Il s'éleva un vent de sable qui charria vers nous des débris d'oasis lointaine, et le campement fut comblé d'oiseaux. Il en était sous chaque tente qui partagèrent notre vie, non farouches et cherchant aisément notre épaule, cependant, faute de nourriture, ils périssaient chaque jour par milliers, bientôt secs et craquants comme une écorce de bois mort. Comme ils empestaient l'air je les fis récolter. On en emplit de grandes corbeilles. Et l'on versa cette poussière à la mer.


Quand nous connûmes pour la première fois la soif, nous assistâmes, à l'heure des chaleurs du soleil, à l'édification d'un mirage. La ville géométrique se reflétait, pure de lignes, dans les eaux calmes. Un homme devint fou, poussa un cri, et, dans la direction de la ville se prit à courir. Comme le cri du canard sauvage qui émigré retentit dans tous les canards, je compris que le cri de l'homme avait ébranlé les autres hommes. Ils étaient prêts, à la suite de l'inspiré, de basculer vers ce mirage et le néant. Une carabine bien ajustée le culbuta. Et il ne fut plus qu'un cadavre, lequel enfin nous rassura.

L'un de mes soldats pleurait.

«Qu'as-tu?» lui dis-je.

Je croyais qu'il pleurait le mort.

Mais il avait découvert à ses pieds une de mes écorces craquantes et il pleurait un ciel déshabillé de ses oiseaux.

«Lorsque le ciel perd son duvet, me dit-il, il y a menace pour la chair de l'homme.»


Nous remontâmes l'ouvrier des entrailles du puits, il s'évanouit, mais il nous avait pu signifier que le puits était sec. Car il est des marées souterraines d'eau douce. Et l'eau, quelques années durant, va penchant vers les puits du Nord. Lesquels redeviennent sources de sang. Mais ce puits nous tenait comme un clou dans une aile.

Tous songeaient aux grandes corbeilles pleines d'écorce de bois mort.

Nous ralliâmes cependant le puits d'El Bahr le lendemain soir.

Je convoquai les guides, la nuit venue:

«Vous nous avez trompés sur l'état des puits. El Bahr est vide. Que ferai-je de vous?»

Luisaient d'admirables étoiles au fond d'une nuit amère à la fois et splendide. Nous disposions de diamants pour notre nourriture.

«Que ferai-je de vous?» disais-je aux guides.

Mais vaine est la justice des hommes. N'étions-nous pas tous changés en ronces?


Le soleil émergea, découpé par la brume de sable en forme de triangle. Ce fut comme un poinçon pour notre chair. Des hommes churent, frappés au crâne. Des fous se déclarèrent en grand nombre. Mais il n'était plus de mirages qui les sollicitassent de leurs cités limpides. Il n'était plus ni mirage ni horizon pur, ni lignes stables. Le sable nous enveloppait d'une lumière tumultueuse de four à briques.

Comme je levais la tête j'aperçus à travers les volutes le tison pâle qui entretenait l'incendie. «Le fer de Dieu, songeais-je, qui nous marque comme des bêtes.»

«Qu'as-tu? dis-je à un homme qui titubait.

— Je suis aveugle.»

Je fis éventrer deux chameaux sur trois et nous bûmes l'eau des viscères. Les survivants nous les chargeâmes de la totalité des outres vides et, gouvernant cette caravane, j'expédiai des hommes vers le puits d'El Ksour que l'on disait douteux.

«Si El Ksour est tari, leur dis-je, vous mourrez là-bas aussi bien qu'ici.»

Mais ils revinrent après deux journées sans événements qui me coûtèrent le tiers de mes hommes.

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