Читаем L’écume des jours полностью

– Elles sont bizarres, je le reconnais, dit Colin, mais il faut les prendre.

– Regarde, dit Chloé. Elles remuent toutes seules, et puis, elles sont à moitié transparentes et ça vit sûrement à l’intérieur.

– Sûrement, dans l’eau que tu bois après, dit Colin, ça ne vit pas longtemps.

– C’est idiot, ce que tu dis… c’est peut-être un poisson… Colin se mit à rire.

– Alors, ça te fortifiera. Il se pencha vers elle et l’embrassa.

– Prends-la, ma Chloé, tu seras si gentille!

– Je veux bien, dit Chloé, mais alors tu m’embrasseras!

– Sûr, dit Colin. Tu n’es pas dégoûtée d’embrasser un vilain mari comme moi…

– C’est vrai que tu n’es pas beau, dit Chloé taquine.

– C’est pas ma faute. Colin baissa le nez.

– Je dors pas assez, continua-t-il.

– Mon Colin, embrasse-moi, je suis très vilaine. Donne-moi deux pilules.

– Tu es folle, dit Colin. Une seule. Allez, avale… Chloé ferma les yeux, elle pâlit et porta la main à sa poitrine.

– Ça y est, dit-elle avec effort. Ça va recommencer… Des gouttelettes de sueur apparaissaient près de ses cheveux brillants. Colin s’assit à côté d’elle et mit un bras autour de son cou. Elle saisit sa main entre les siennes et gémit.

– Calme, ma Chloé, dit Colin, il faut.

– J’ai mal… murmura Chloé. Des larmes grosses comme des yeux parurent au coin de ses paupières et tracèrent des sillons froids sur ses joues rondes et douces.

XXXVII

– Je ne peux plus tenir debout… murmura Chloé. Elle avait les deux pieds par terre et tentait de se lever.

– Ça ne va pas du tout, dit-elle… Je suis toute flasque. Colin s’approcha d’elle et la souleva. Elle s’accrocha à ses épaules.

– Tiens-moi, Colin. Je vais tomber!

– C’est le lit qui t’a fatiguée… dit Colin.

– Non, dit Chloé. C’est les pilules de ton vieux marchand. Elle essaya de se tenir debout toute seule et chancela. Colin la rattrapa et elle l’entraîna dans sa chute sur le lit.

– Je suis bien comme ça, dit Chloé. Reste contre moi. Cela fait si longtemps que nous n’avons pas couché ensemble!

– Il ne faut pas, dit Colin.

– Si, il faut. Embrasse-moi. Je suis ta femme, oui ou non?

– Oui, dit Colin, mais tu ne vas pas bien.

– C’est pas ma faute, dit Chloé et sa bouche frémit un peu, comme si elle allait pleurer.

Colin se pencha vers elle et l’embrassa très doucement, comme il eût embrassé une fleur.

– Encore, dit Chloé. Et pas seulement ma figure… Tu ne m’aimes plus alors? Tu ne veux plus de femme?

Il la serra plus fort dans ses bras. Elle était tiède et odorante. Un flacon de parfum, sortant d’une boîte capitonnée de blanc.

– Oui, dit Chloé en s’étirant… encore…

XXXVIII

– Nous serons en retard, affirma Colin.

– Ça ne fait rien, dit Chloé, règle ta montre.

– Tu ne veux vraiment pas qu’on y aille en voiture?…

– Non… dit Chloé. Je veux me promener avec toi dans la rue.

– Mais il y a un bout de chemin!

– Ça ne fait rien, dit Chloé… Quand tu m’as… embrassée, tout à l’heure, ça m’a remise d’aplomb. J’ai envie de marcher un peu.

– Je vais dire à Nicolas de venir nous rechercher en voiture, alors? suggéra Colin.

– Oh! si tu veux…

Elle avait mis pour se rendre chez le docteur, une petite robe bleu tendre, décolletée très bas en pointe et portait un mantelet de lynx, accompagné d’une toque assortie. Des chaussures de serpent teint complétaient l’ensemble.

– Viens, chatte, dit Colin.

– Ce n’est pas du chat, affirma Chloé. C’est du lynx.

– C’est trop dur à prononcer, dit Colin. Ils sortirent de la chambre et passèrent dans l’entrée. Devant la fenêtre, Chloé s’arrêta.

– Qu’est-ce qu’il y a, ici? Il fait moins jour que d’habitude…

– Sûrement pas, dit Colin. Il y a beaucoup de soleil.

– Si, dit Chloé, je me rappelle bien, le soleil venait jusqu’à ce dessin-là du tapis, et, maintenant, il vient seulement là…

– Ça dépend de l’heure, dit Colin.

– Mais non, ça ne dépend pas de l’heure, puisque c’était à la même heure!…

– On regardera demain à la même heure, dit Colin.

– Tu vois bien, il venait jusqu’au septième trait. Là, il est au cinquième.

– Viens, dit Colin. Nous sommes en retard. Chloé se fit un sourire en passant devant la grande glace du couloir dallé.

Ce qu’elle avait ne pouvait pas être grave, et, dorénavant, ils iraient souvent se promener ensemble. Il ménagerait ses doublezons, il lui en restait suffisamment pour leur faire une vie agréable. Peut-être qu’il travaillerait…

L’acier du pêne cliqueta et la porte se referma. Chloé se tenait à son bras. Elle allait à petits pas légers. Colin en faisait un pour deux des siens.

– Je suis contente, dit Chloé. Il y a du soleil et ça sent bon les arbres.

– Sûr! dit Colin. C’est le printemps!

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