Читаем L’écume des jours полностью

– Vous savez, dit le libraire, qu’en ce moment, il prépare une encyclopédie de la nausée en vingt volumes avec des photos et j’aurai des manuscrits…

– Mais je ne pourrai jamais… dit Chick atterré.

– Qu’est-ce que vous voulez que ça me foute? demanda le libraire.

– Combien pour ces trois choses-là? demanda Chick.

– M ille doublezons, dit le marchand. C’est mon dernier prix. J’en ai refusé douze cents hier, et c’est parce que vous avez l’air soigneux.

Chick tira son portefeuille. Il était horriblement pâle.

XLIII

– Tu vois, dit Colin, On ne met plus de nappe.

– Ça ne fait rien, dit Chick. Pourtant, je ne comprends pas pourquoi le bois est gras comme ça…

– Je ne sais pas, dit Colin distraitement. Je crois qu’on ne peut plus le nettoyer. Ça revient tout le temps de l’intérieur.

– Et est-ce que le tapis n’était pas en laine, avant, demanda Chick. Celui-là a l’air en coton…

– C’est le même, dit Colin. Non, je ne crois pas qu’il soit différent.

– C’est drôle, dit Chick, on a l’impression que le monde s’étrique autour de soi.

Nicolas apportait une soupe onctueuse où nageaient des croûtons. Il leur servit de grandes assiettées.

– Qu’est-ce que c’est, ça, Nicolas, demanda Chick.

– Une soupe au Kub et à la farine de panouilles, répondit Nicolas. C’est super.

– Ah! dit Chick, vous avez trouvé ça dans Gouffé?

– Pensez-vous! dit Nicolas. C’est une recette à de Pomiane. Gouffé, c’est bon pour les snobards. Et puis, il faut un tel matériel pour ça!…

– Mais vous avez ce qu’il faut, dit Chick.

– Quoi? dit Nicolas. Il y a juste le gaz et un frigiploque, comme partout. Qu’est-ce que vous imaginez?

Oh!… Rien!!! dit Chick.

remua sur sa chaise. Il ne savait comment continuer la conversation.

– Tu veux du vin? demanda Colin. Je n’ai plus que celui-là, dans ma cave. Il n’est pas mauvais.

Chick tendit son verre.

– Alise est venue voir Chloé, il y a trois jours, dit Colin. Je n’ai pas pu la voir et hier Nicolas a emmené Chloé à la montagne.

– Oui, dit Chick. Alise me l’avait dit.

– J’ai reçu une lettre du professeur Mangemanche, dit Colin. Il me demandait beaucoup d’argent. Je crois que c’est un homme capable.

Colin avait mal à la tête. Il aurait voulu que Chick parle, raconte des histoires, n’importe quoi. Chick fixait quelque chose dans le vague, à travers la fenêtre. Soudain il se leva et, tirant un mètre de sa poche, il alla mesurer le châssis.

– J’ai l’impression que ça change, dit-il.

– Comment ça? demanda Colin avec détachement.

– Ça rétrécit, dit Chick, et la p ièce aussi…

– Comment veux-tu? dit Colin. Ça n’a pas le sens commun Chick ne répondit pas. Il prit son carnet et son crayon et nota des chiffres.

– As-tu trouvé du travail? demanda-t-il.

– Non… dit Colin. J’ai un rendez-vous tantôt et un demain.

– Quel genre de travail cherches-tu? demanda Chick.

– Oh! n’importe quoi, dit Colin. Pourvu qu’ils me donnent de l’argent. Les fleurs coûtent très cher.

– Oui, dit Chick.

– Et ton travail à toi? dit Colin.

– Je me faisais remplacer par un type, dit Chick, parce que j’avais beaucoup de choses à faire…

– Ils avaient accepté? demanda Colin.

– Oui, ça allait, il était bien au courant.

– Alors? demanda Colin.

– Quand j’ai voulu rentrer, expliqua Chick, ils m’ont dit que l’autre faisait très bien l’affaire, mais que si je voulais un nouveau poste, ils en avaient un à m’offrir. Seulement, c’était moins bien payé…

– Ton oncle ne peut plus te donner d’argent, dit Colin. Il ne posait même pas la question. Cela lui paraissait évident. je ne pourrais pas lui en demander, dit Chick. Il est mort.

– Tu ne me l’avais pas dit…

– Ce n’était p as intéressant, murmura Chick. Nicolas revint avec une poêle graisseuse dans laquelle se débattaient trois saucisses noires

– Mangez-les comme ça, dit-il, je ne peux p as en venir à bout. Elles sont résistantes à un point extraordinaire. J’ai mis de l’acide nitrique, c’est pour ça qu’elles sont noires mais ça n’a pas suffi.

Colin réussit à piquer une des saucisses avec sa fourchette et elle se tordit dans un dernier spasme.

– J’en ai une, dit-il. A toi, Chick!

– J’essaye, dit Chick, mais c’est dur. Il envoya un grand jet de graisse sur la table.

– Zut! dit-il.

– Ça ne fait rien, dit Nicolas. C’est bon pour le bois. Chick parvint à se servir et Nicolas remmena la troisième saucisse.

– Je ne sais pas ce qu’il y a, dit Chick. Est-ce que c’était comme ici, avant?

– Non, avoua Colin. Ça change partout. Je ne peux rien y faire. C’est comme la lèpre. C’est depuis que je n’ai plus de doublezons…

– Tu n’en as plus du tout? demanda Chick.

– A peine… répondit Colin. J’ai payé d’avance pour la montagne et pour les fleurs parce que je ne veux rien ménager pour tirer Chloé de là. M ais, à part ça, les choses vont mal d’elles- mêmes.

Chick avait fini sa saucisse.

– Viens voir le couloir de la cuisine, dît Colin!

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