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Le 327e mâle se prépare lui aussi. Dans le champ de ses antennes, les autres mâles ne parlent que de femelles. Très peu en ont vu. Ou alors c'étaient de furtives visions dans les couloirs de la Cité interdite. Beaucoup fantasment. Ils les imaginent avec des parfums capiteux, d'un érotisme foudroyant. Un des princes prétend avoir échangé une trophallaxie avec une femelle. Son miellat avait la saveur de la sève de bouleau, ses hormones sexuelles émettaient des effluves comparables à ceux des jonquilles coupées. Les autres l'envient en silence. 327e qui, lui, a vraiment goûté au miellat d'une femelle (et de quelle femelle!) sait que celui-ci n'est en rien différent du miellat des ouvrières ou des bonbonnes. Toutefois, il ne se mêle pas à la conversation. Une idée coquine lui traverse plutôt l'esprit. Il aimerait bien fournir à la 56e femelle les spermatozoïdes nécessaires à la construction de sa future Cité. S'il pouvait la retrouver… Dommage qu'ils n'aient pas pensé à mettre au point une phéromone de reconnaissance pour se rejoindre parmi la foule. Lorsque la 56e femelle parvient dans la salle des mâles, c'est la surprise générale. Venir ici est contraire à toutes les règles de la Meute. Les mâles et les femelles ne doivent se voir pour la première fois qu'au moment du vol nuptial. On n'est pas chez les naines, ici. On ne copule pas dans les couloirs.
Les princes qui voulaient tant savoir ce qu'était une femelle sont désormais fixés. Ils émettent avec ensemble des parfums hostiles signifiant qu'elle ne doit pas rester dans cette pièce.
Elle continue malgré tout à progresser au milieu du tumulte des préparatifs. Elle bouscule tout le monde, disperse à tout va ses phéromones.
327e! 327e! Où es-tu, 327e?
Les princes ne se gênent pas pour lui dire qu'on ne choisit pas comme ça son mâle copulateur! Elle doit être patiente, faire confiance au hasard. Un peu de pudeur…
La 56e femelle finit pourtant par trouver son compagnon. Il est mort. Sa tête a été tranchée net d'un coup de mandibules.