Enfin, chers papa et maman, me voilà à Munich, où je suis arrivé, sain et sauf, dimanche dernier, c’était le 26 septembre v st. Vous savez par ma lettre de Réval que j’ai dû m’embarquer le 4 sept pour Helsingfors, de là je me suis rendu par Abo, à Stockholm, où je n’ai pu m’arrêter qu’un jour. Je suis allé attendre dans un petit endroit de la côte de Suède, Istadt
, le bateau à vapeur qui m’a transporté à Stralsund, d’où j’ai gagné, par le nouveau chemin de fer, Berlin. J’ai été singulièrement favorisé par le temps, si bien que dans toute cette tournée que j’ai faite de la Baltique, j’en ai une navigation aussi douce et aussi paisible que pourrait l’être celle d’un lac. Stockholm que je n’ai vu qu’en passant est un magnifique panorama et une pauvre ville. A Berlin, où je me suis arrêté cinq jours, j’ai beaucoup vu les Lerchenfeld et les Meyendorff*; lui, Meyendorff, m’a chargé de faire ses compliments à Nicolas qu’il a connu d’autre temps à Vienne. Quant à sa femme, dont j’avais beaucoup entendu parler comme d’une personne très spirituelle, très originale et passablement capricieuse, elle m’a fait l’accueil le plus gracieux, et nous nous sommes quittés les meilleurs amis du monde. C’est une cousine à Lerchenfeld et une amie à Mad. de Krüdener qui m’avait donné une lettre pour elle. J’ai eu par elle beaucoup de détails sur J. Gagarine qu’elle affectionne tout particulièrement et qu’elle a vu tous les jours l’hiver dernier à Berlin.