Читаем Сatherine et le temps d'aimer полностью

Certes, Jehan lui avait appris l'amour et elle y avait pris goût, mais, en se donnant à lui, Marie avait perdu, peu à peu, toute valeur aux yeux de son amant. Et puis, elle l'aimait trop, elle finissait par l'ennuyer. Enfin, les yeux noirs des belles filles du Midi avaient attiré le garçon qui n'avait plus eu qu'une idée : se débarrasser de Marie qui ne cessait de parler mariage. Et il avait trouvé pour cela le plus bassement abject des moyens ; spéculant sur la beauté fraîche de sa fiancée, il l'avait vendue à un trafiquant grec de Marseille qui, enlevant la jeune fille nuitamment, l'avait embarquée sur sa nef marchande et l'avait revendue, au marché des esclaves d'Alexandrie, au pourvoyeur sarrasin du Calife de Grenade.

— Voilà comment je suis arrivée ici, conclut Marie avec simplicité. Bien souvent, j'ai regretté mes noces bourguignonnes... et la maison de mes parents. Ce Colas n'était peut-être pas un mauvais homme, j'aurais pu être heureuse!

— Et Jehan ? avait demandé Catherine passionnée malgré elle.

Les yeux clairs de la petite avaient eu un éclair meurtrier.

— Si je le retrouve un jour, je le tuerai ! affirma-t-elle d'une voix si paisible que Catherine ne mit pas en doute un seul instant cette affirmation.

Après quoi, encouragée par la confiance que Marie venait de lui témoigner, elle avait, à son tour, raconté son histoire à sa nouvelle amie.

Cela avait pris un long moment, mais Marie l'avait écoutée de bout en bout sans l'interrompre. C'est seulement lorsque la jeune femme eut terminé son récit que Marie soupira :

— Quelle fabuleuse histoire ! Ainsi le mystérieux Franc est votre époux ? Et moi qui te... qui vous croyais une pauvre fille comme moi

! Je sais maintenant où je vous ai vue : c'était à Dijon où mon père m'avait menée à la foire. J'étais bien jeune encore, mais j'ai gardé la vision éblouie d'une dame merveilleusement belle et aussi brillante que le soleil.

— Tu dois trouver que j'ai changé ! remarqua Catherine avec un peu d'amertume. Et il n'y a aucune raison pour que tu me dises vous.

Il n'y a plus de distance entre nous maintenant...

— Changé ? fit la petite avec gravité. Certes, vous avez changé, mais, à cette époque, vos parures empêchaient presque d'apprécier votre beauté. Maintenant, elle est plus évidente ! Vous êtes différente, voilà tout.

— Je t'en supplie, pria Catherine gentiment, ne me traite pas en grande dame ! Simplement en amie, j'en ai bien besoin.

Marie, alors, avait joyeusement consenti à laisser de côté le vous protocolaire et, la glace étant définitivement brisée, les deux jeunes femmes s'étaient retrouvées complices, liées l'une à l'autre aussi étroitement que par un lien du sang. Marie, venue moitié par désœuvrement, moitié par curiosité, se retrouva dévouée à Catherine corps et âme, son alliée pour le meilleur et pour le pire.

— Promets-moi, si tu fuis, de m'emmener avec toi et je ferai tout pour t'aider ! Tu dois tellement souffrir à cause de Zobeïda.

— Si je quitte ce palais et cette ville, tu me suivras, je le jure.

Alors, la jeune fille avait fourni à sa nouvelle amie quelques renseignements pleins d'intérêt.

— Tu es en danger, lui dit-elle. Si le Calife ne revient pas, tu ne vivras pas une heure de plus.

— Pourquoi ne reviendrait-il pas ?

— Parce qu'Aben-Ahmed Banu Saradj, le Grand Vizir, le hait presque autant qu'il désire Zobeïda dont il était l'amant avant l'arrivée du chevalier franc. Il désire aussi s'emparer du trône pour y faire monter la princesse avec lui... et cette soi-disant expédition de Yusuf, l'ancien Calife, père de Muhammad, contre son fds, ne me dit rien qui vaille. Les deux hommes ne s'aiment pas, mais Yusuf est las du pouvoir. Il faut la naïveté de son fils pour croire qu'il souhaite lui reprendre un trône abandonné de son plein gré. La naïveté et les insinuations de Banu Saradj !... Je crains fort que le Maître ne soit allé au-devant d'une embuscade bien montée.

— Alors ? fit Catherine en pâlissant, je suis perdue ?

— Pas encore ! Muhammad est naïf mais valeureux. C'est un guerrier, il peut s'en tirer. C'est pourquoi Zobeïda se contente de te faire surveiller. Si son frère revient, elle n'aura fait que veiller, un peu trop soigneusement peut-être, sur la favorite de son frère bien-aimé.

Et si la nouvelle de la mort du Calife arrive ici, tu ne vivras pas une heure de plus !

— Pourquoi ? Que lui ai-je fait ?

— Toi, rien. Mais Zorah l'Égyptienne s'est chargée de toi. Elle est bien vue de la princesse envers laquelle elle a toujours montré une écœurante servilité. Et, comme Zorah veut ta mort à tout prix, elle a fait preuve d'imagination... je pourrais presque dire de génie puisqu'elle a, sans le savoir, découvert la vérité !...

— Que veux-tu dire ?

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