Nous ne croyons pas à la pathologie du marquis de Valdegamas. Ou le danger n'est pas si grand, ou le remède est trop faible. – L'autorité royale est bien restaurée, ses armées permanentes ont le dessus, l'église triomphe, M. Thiers lui-même est devenu très catholique, la réaction ne laisse rien à désirer, – et pourtant le salut ne vient pas. – Est-ce parce que l'Angleterre persiste dans le schisme?
On accuse tous les jours les socialistes de n'être fort que dans la critique, dans la constatation du mal, dans la négation. Et vous-mêmes, messieurs les antisocialistes?
Pour comble de confusion, la rédaction d'un journal blanc
M. Cortès se place exactement sur le terrain des conservateurs romains, tels que Pline, Trajan, Dioclétien, Julien etc. Il voit comme eux le voyaient, par rapport à Rome, la dissolution de l'état actuel del'Europe, – il en frémit, ce qui est très naturel, car il y a de quoi frémir, – et désire sauver, à tout prix, cette société mourante. Pour la sauver, il cherche les moyens d'arrêter l'avenir.
Dans son raisonnement il part (comme les romains) d'une donnée fausse, d'une supposition sans preuve, d'une opinion exclusive. Il pense que les formes actuelles de l'existence sociale, telles qu'elles ont été élaborées par l'action mutuelle des trois éléments de l'histoire européenne: l'élément romain, chrétien et germanique, – sont les seules possibles. Pourtant nous voyons dans l'histoire ancienne et dans l'Orient contemporain des bases sociales toutes différentes, peut-être inférieures, mais d'une énorme solidité.
M. Cortès suppose que la civilisation ne peut se développer que dans les formes politiques de l'Europe actuelle. Et pourtant la Grèce et Rome sont là pour prouver le contraire. Il est facile de dire (comme l'a fait l'orateur) que le monde ancien a été
Frappé de cette lugubre perspective, il cherche des moyens de salut; mais où trouver un point d'appui, quelque chose de stable dans ce monde agonisant? Tout est «pourriture», tout se décompose… Poussé par le désespoir, il s'adresse à la mort morale et à la mort physique; il veut s'appuyer sur le soldat et sur le prêtre.
Quelle est donc cette organisation sociale qui demande de pareils moyens de salut?
Et quelle qu'elle soit, vaut-elle la peine d'être conservée à ce prix?
Nous sommes d'accord avec M. Cortès, l'Europe telle qu'elle est à présent, s'en va. Le socialisme, dès sa première apparition, depuis le saint-simonisme, l'a dit; sur ce point toutes les écoles socialistes ont été d'accord.
La grande différence entre les révolutionnaires politiques et les socialistes consiste en ce que les hommes politiques voulaient faire des réformes et des améliorations en restant sur le même terrain que le monde catholique. Le socialisme, au contraire, a proclamé la négation la plus complète de l'ordre des choses existant, il a nié la monarchie et la représentation souveraine, les tribunaux et les droits, le code civil et le code criminel, il a nié l'Europe féodale, catholique, comme le faisaient, par rapport à Rome, Saint Paul ou Saint Augustin, ces hommes qui disaient en face aux Romains: «Pour nous, vos vertus sont des vices, votre sagesse est folie; comme il en est pour vous de notre sainte foi».
Une pareille négation, si elle s'enracine et se répand, si elle agite toute une génération, n'est pas un caprice d'une imagination maladive, elle n'est pas le cri individuel d'une âme froissée par le monde, mais bien un arrêt de mort prononcé contre un monde décrépit et qui ne tardera pas à être exécuté.