Frère Marin - dit l'un des petits avec des yeux graves -, tout le monde à la maison, a demandé à Dieu que vous alliez mieux !
Merci, mon enfant !... - lui dit l'agonisante, faisant son possible pour cacher ses souffrances.
Puis ce fut le tour d'une petite dans son pauvre habit qui a balbutié d'un ton discret :
Frère Marin, le père Épiphane ne m'a pas laissée planter le rosier au pied de l'enclos et il m'a sévèrement réprimandée.
-Allons, allons ?... Père Épiphane a raison... les Unir, n'ont pas leur place près de l'enclos... Tu planteras le nouveau rosier près de la fenêtre. Là, il recevra plus de soleil... Et tu donneras au père Épiphane la première fleur.
Tu sais, Frère - lui dit un autre petit les cheveux décoiffés -, les moutons cette nuit nous ont donné deux nouveaux agneaux.
Tu t'en occuperas, mon enfant !... - lui suggéra la jeune femme avec difficulté.
Frère - s'exclama un autre garçon -, j'ai supplié Jésus pour que ta précieuse santé revienne.
Mon enfant... - dit l'agonisante -, nous ne devons pas demander ceci ou cela au Seigneur, mais plutôt la compréhension de sa volonté qui est souveraine et juste.
Et en raison de l'inquiétude infantile qu'il l'entourait, elle ajouta désirant concentrer ses dernières énergies sur la prière :
Les enfants... chantez... pour moi...
Parmi eux, il y eut un léger tumulte quant au choix de l'hymne qui allait être chanté.
C'est, alors, que l'une des petites se souvint que le soleil allait disparaître à l'horizon, laissant entendre à ses compagnons, qu'à cette heure, le frère Marin préférait toujours l'« Hymne du Soir », enseigné à tous avec une affection toute fraternelle.
Alors, ils se sont tous donné la main autour du lit où la malade offrait à Dieu ses dernières pensées, tandis que tous les frères de la communauté observaient à distance en pleurant la scène émouvante et pénible.
Quelques minutes plus tard, ils élevaient aux cieux les notes cristallines du simple cantique :
Sois loué, Jésus !
À l'aube pleine de rosée,
Qui apporte le jour, le travail,
Où nous avançons en apprenant.
Sois loué, Seigneur !
Pour la lumière des heures calmes,
Qui apaise nos âmes
Au moment du crépuscule...
La terre repose en prières, Le ciel magnifique scintille, Et notre croyance tranquille Se repose en ton amour C'est l'heure de ta bénédiction À la lumière de la nature Qui nous conduit à la beauté De la consolation.
C'est à cette heure divine Que ton amour grand et auguste, Donne la paix à l'esprit du juste, Soulagement et réconforte la douleur !
Maître Aimé bénis
Notre simple prière,
Fais la lumière sur le tumulte
Du cœur pécheur !
Viens à nous ! Du ciel heureux, Soutiens notre espoir, Nous avons soif de tranquillité, D'amour, de vie et de lumière ! Dans l'après-midi fait de calme, Nous sentons que tu es notre refuge, Nous voulons vivre avec toi, Viens jusqu'à nous, mon Jésus !...
Célia écoutait l'hymne des enfants dans ses derniers accords. Elle se figurait que la simple pièce était pleine d'artistes inestimables. Ils étaient tous jeunes et gracieux, des enfants joyeux qui empoignaient des flûtes et des harpes sidérales, des luths et des timbales divines. Elle aurait voulu regarder les enfants de son école humble et leur parler, une fois encore, de sa joie infinie, mais en même temps, elle s'est sentie entourée d'êtres affectueux qui, souriants, lui tendaient leurs bras. Il y avait là ses parents, son vénérable grand-père, Nestor, Hatéria, Lesius Munacius et la figure charmante de Cirus, comme enveloppée d'un voile de neige translucide... À un geste de l'aimante entité Cneius Lucius, Cirus avança en lui tendant les bras. C'était le geste d'affection que son cœur avait attendu toute sa vie durant !... Elle voulut parler de son bonheur et de sa gratitude envers le Seigneur des Mondes, mais se sentait épuisée comme si elle arrivait d'une lutte exténuante.
Tenant son front dans ses mains, au son de la musique pleine d'élévation, Cirus lui dit les yeux larmoyants :
- Entends, Célia ! C'est l'un des sublimes chants d'amour qui t'est consacré sur terre ! Elle ne vit pas que les enfants empressés couvraient de larmes ses mains immobiles et blanches, étreignant tendrement son cadavre de neige... D'un seul coup, tous les frères du monastère se lancèrent émus sur ses restes, alors qu'au plan invisible, un groupe d'entités amies et aimantes conduisait dans une vague de lumière et de parfums, au firmament de l'Infini, cette âme vertueuse de martyre.
DANS LES SPHÈRES SPIRITUELLES
En rendant les derniers hommages au frère Marin, les religieux du monastère connurent la pénible vérité. Ce n'est qu'à ce moment-là, qu'ils ont pris véritablement conscience du fait que le frère calomnié des pauvres et des enfants dépouillés était une vierge chrétienne qui avait donné l'exemple parmi eux des plus grandes vertus évangéliques.
Face à cet événement imprévisible et une fois passe l'étonnement provoqué par ce choc, tous les moines. Épiphane compris, se sont prosternés humblement, baignés des sanglots de la componction et du repentir.