– L’année dernière, nous avions tout lieu de penser que quelqu’un, à l’intérieur de Poudlard, essayait de te tuer, Harry ! répliqua Sirius, agacé. Cette année, nous savons qu’il y a quelqu’un, à l’extérieur de Poudlard, qui aimerait bien nous tuer tous et voilà pourquoi apprendre à vous défendre efficacement me semble être une très bonne idée !
– Et si on se fait renvoyer ? demanda Hermione d’un air songeur.
– Hermione, c’est toi qui es à l’origine de cette idée ! s’exclama Harry en la fixant des yeux.
– Je sais bien. Je me demandais simplement ce qu’en pensait Sirius, répondit-elle avec un haussement d’épaules.
– Il vaut mieux être renvoyé et capable de se défendre que de rester tranquillement assis dans une école sans avoir aucune idée de ce qui se passe dehors, répondit Sirius.
– Bravo ! approuvèrent Harry et Ron d’une même voix enthousiaste.
– Donc, reprit Sirius, comment comptez-vous organiser ce groupe ? Où allez-vous vous réunir ?
– C’est le problème, dit Harry. Je ne sais pas du tout où nous pourrions aller.
– Pourquoi pas à la Cabane hurlante ? suggéra Sirius.
– C’est une idée ! dit Ron, très excité.
Hermione, en revanche, émit un grognement sceptique. Les trois autres se tournèrent vers elle, la tête de Sirius pivotant dans les flammes.
– À votre époque, Sirius, vous n’étiez que quatre à vous réunir dans la Cabane hurlante, expliqua Hermione. Vous aviez tous la faculté de vous métamorphoser en animaux et j’imagine qu’en vous serrant un peu, vous auriez pu tenir sous une seule cape d’invisibilité en cas de besoin. Mais nous, nous sommes vingt-huit et aucun d’entre nous n’est un Animagus, alors ce n’est pas une cape mais un chapiteau d’invisibilité qu’il nous faudrait.
– Tu as raison, répondit Sirius, un peu dépité. Mais je suis sûr que vous trouverez un endroit. Il y avait un passage secret assez spacieux derrière le grand miroir du quatrième étage, vous auriez peut-être assez de place pour y pratiquer des maléfices.
– Fred et George m’ont dit qu’il n’existe plus, déclara Harry en hochant la tête. Il y a eu un éboulement ou je ne sais quoi.
– Ah…, murmura Sirius avec un froncement de sourcils. Bon, je vais y penser et je reviendrai…
Il s’interrompit, le visage soudain tendu, anxieux. Sa tête pivota sur le côté, le regard apparemment fixé sur le mur en briques de l’âtre.
– Sirius ? s’inquiéta Harry.
Mais il avait disparu. Harry observa les flammes pendant un moment puis se tourna vers Ron et Hermione.
– Pourquoi est-ce qu’il… ?
Hermione laissa alors échapper un gémissement de terreur et se leva d’un bond, les yeux fixés sur la cheminée.
Une main était apparue parmi les flammes, cherchant à saisir quelque chose, une main aux doigts boudinés, surchargés d’horribles vieilles bagues démodées.
Tous trois prirent aussitôt la fuite. Arrivé à la porte du dortoir des garçons, Harry jeta un regard par-dessus son épaule. La main d’Ombrage, léchée par les flammes, continuait à s’ouvrir et à se refermer telle une pince, à l’endroit précis où s’était trouvée la tête de Sirius un instant auparavant, comme si elle cherchait à la saisir par les cheveux.
18. L’ARMÉE DE DUMBLEDORE
– Ombrage a lu ton courrier, Harry. Il n’y a pas d’autre explication.
– Tu crois que c’est elle qui a attaqué Hedwige ? demanda-t-il, scandalisé.
– J’en suis presque certaine, dit Hermione d’un air grave. Surveille ta grenouille, elle s’échappe.
Harry pointa sa baguette magique sur la grenouille-taureau qui sautillait, pleine d’espoir, vers le bord opposé de la table.
–
Le cours de sortilèges était l’un des plus propices au bavardage. Il y avait en général tant de mouvements et d’activités diverses qu’on ne courait pas grand risque d’être entendu. Ce jour-là, entre les coassements des grenouilles et les croassements des corbeaux, auxquels s’ajoutait le martèlement de la pluie contre les fenêtres, Harry, Ron et Hermione pouvaient parler sans se faire remarquer de la façon dont Ombrage avait failli attraper Sirius.
– J’ai eu des soupçons depuis le jour où Rusard t’a accusé de commander des Bombabouses. C’était tellement stupide, comme mensonge ! murmura Hermione. Il suffisait de lire ta lettre pour s’apercevoir que ce n’était pas vrai et donc, tu n’aurais eu aucun ennui – un peu léger, comme farce, non ? Je me suis alors dit : « Et si quelqu’un cherchait simplement un prétexte pour lire ton courrier ? » Dans ce cas, ce serait le meilleur moyen pour Ombrage d’y arriver : te dénoncer à Rusard, lui laisser le travail peu reluisant de confisquer ta lettre, puis s’arranger pour la lui voler ou même exiger de la voir. Je ne pense pas que Rusard s’y opposerait. Il n’a jamais beaucoup défendu les droits des élèves, non ? Harry, tu écrases ta grenouille.
Il la serrait en effet si fort dans sa main qu’elle en avait les yeux qui lui sortaient de la tête. Harry reposa la grenouille sur la table.