Читаем JOSEPH BALSAMO Mémoires d’un médecin Tome IV полностью

– Ah! docteur, que voulez-vous!… Être mère, c’est un état de démence! mais cette démence, Dieu me l’a envoyée. Tant que cet enfant aura besoin de moi, je persisterai dans ma résolution.


Philippe et le docteur échangèrent soudain un regard.


– Mon enfant, dit le docteur le premier, je ne suis pas un prédicateur bien éloquent; mais je crois me souvenir que Dieu défend les attachements trop vifs à la créature.


– Oui, ma sœur, ajouta Philippe.


– Dieu ne défend pas à une mère d’aimer vivement son fils, je crois, docteur?


– Pardonnez-moi, ma fille, le philosophe, le praticien va essayer de mesurer l’abîme que creuse le théologien pour les passions humaines. À toute prescription qui vient de Dieu, cherchez la cause, non seulement morale, c’est quelquefois une subtilité de perfection, cherchez la raison matérielle. Dieu défend à une mère d’aimer excessivement son enfant, parce que l’enfant est une plante frêle, délicate, accessible à tous les maux, à toutes les souffrances, et qu’aimer vivement une créature éphémère, c’est s’exposer au désespoir.


– Docteur, murmura Andrée, pourquoi me dites-vous cela? Et vous, Philippe, pourquoi me considérez-vous avec cette compassion… cette pâleur?


– Chère Andrée, interrompit le jeune homme, suivez mon conseil d’ami tendre; votre santé est rétablie, entrez le plus tôt possible au couvent de Saint-Denis.


– Moi!… Je vous ai dit que je ne quitterai pas mon fils.


– Tant qu’il aura besoin de vous, dit doucement le docteur.


– Mon Dieu! s’écria Andrée, qu’y a-t-il? Parlez. Quelque chose de triste… de cruel?


– Prenez garde, murmura le docteur à l’oreille de Philippe; elle est bien faible encore pour supporter un coup décisif.


– Mon frère, tu ne réponds pas; explique-toi.


– Chère sœur, tu sais que j’ai passé, en revenant par le Point-du-Jour, où ton fils est en nourrice.


– Oui… Eh bien?


– Eh bien, l’enfant est un peu malade.


– Malade… ce cher enfant! Vite, Marguerite… Marguerite… une voiture! je veux aller voir mon enfant!


– Impossible! s’écria le docteur; vous n’êtes pas en état de sortir ni de supporter une voiture.


– Vous m’avez dit encore ce matin que cela était possible; vous m’avez dit que, demain, au retour de Philippe, j’irais voir le pauvre petit.


– J’augurais mieux de vous.


– Vous me trompiez?


Le docteur garda le silence.


– Marguerite! répéta Andrée, qu’on m’obéisse… une voiture!


– Mais tu peux en mourir, interrompit Philippe.


– Eh bien, j’en mourrai!… je ne tiens pas tant à la vie!…


Marguerite attendait, regardant tour à tour sa maîtresse, son maître et le docteur.


– Çà! quand je commande!… s’écria Andrée, dont les joues se couvrirent d’une rougeur subite.


– Chère sœur!


– Je n’écoute plus rien et, si l’on me refuse une voiture, j’irai à pied.


– Andrée, dit tout à coup Philippe en la prenant dans ses bras, tu n’iras pas, non, tu n’as pas besoin d’y aller.


– Mon enfant est mort! articula froidement la jeune fille en laissant tomber ses bras le long du fauteuil où Philippe et le docteur venaient de l’asseoir.


Philippe ne répondit qu’en baisant une de ses mains froides et inertes… Peu à peu, le cou d’Andrée perdit sa rigidité; elle laissa tomber sa tête sur son sein et versa d’abondantes larmes.


– Dieu a voulu, dit Philippe, que nous subissions ce nouveau malheur; Dieu, qui est si grand, si juste; Dieu, qui avait sur toi d’autres desseins peut-être; Dieu, enfin, qui jugeait, sans doute, que la présence de cet enfant à tes côtés était un châtiment immérité.


– Mais enfin…, soupira la pauvre mère, pourquoi Dieu a-t-il fait souffrir cette innocente créature?


– Dieu ne l’a pas fait souffrir, mon enfant, dit le docteur; la nuit même de sa naissance, il mourut… Ne lui donnez pas plus de regrets qu’à l’ombre qui passe et s’évanouit.


– Ses cris que j’entendais?…


– Furent son adieu à la vie.


Andrée cacha son visage dans ses mains, tandis que les deux hommes, confondant leur pensée dans un éloquent regard, s’applaudissaient de leur pieux mensonge.


Soudain Marguerite rentra tenant une lettre… Cette lettre était adressée à Andrée… La suscription portait:


«Mademoiselle Andrée de Taverney, Paris, rue Coq-Héron, 9, la première porte cochère en partant de la rue Plâtrière.»


Philippe la montra au docteur par-dessus la tête d’Andrée, qui ne pleurait plus, mais s’absorbait dans ses douleurs.


«Qui peut lui écrire ici? pensait Philippe. Nul ne connaissait son adresse, et l’écriture n’est pas de notre père.»


– Tiens, Andrée, dit Philippe, une lettre pour toi.


Sans réfléchir, sans résister, sans s’étonner, Andrée déchira l’enveloppe, et, essuyant ses yeux, déplia le papier pour lire; mais à peine eut-elle parcouru les trois lignes qui composaient cette lettre, qu’elle poussa un grand cri, se leva comme une folle et, roidissant ses bras et ses pieds dans une contraction terrible, tomba, lourde comme une statue, dans les bras de Marguerite qui s’approchait.


Philippe ramassa la lettre et lut:


«En mer, ce 13 décembre 17…


Je pars, chassé par vous, et vous ne me reverrez plus; mais j’emporte mon enfant, qui jamais ne vous appellera sa mère!


Gilbert.»


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