Paul commença à impressionner son auditoire aristocratique en faisant allusion au « Dieu inconnu », honoré sur les autels athéniens. Sa parole vibrante présentait de singulières nuances ; les images étaient plus riches et belles que celles enregistrées par l'auteur des Actes. Denys lui-même était admiratif. L'apôtre se révélait très différent de celui qu'il avait vu sur la place publique. Il parlait avec une grande noblesse, avec emphase, les images se revêtaient de couleurs extraordinaires ; mais quand il se mit à parler de la résurrection, il y eut un murmure fort et prolongé. L'assistance riait ouvertement, les moqueries acerbes pleuvaient. L'aristocratie intellectuelle athénienne ne pouvait faire abstraction de ses préjugés scientifiques.
Les plus ironiques quittaient l'enceinte avec des éclats de rire sarcastiques, tandis que les plus modérés, par considération pour Denys, se sont approchés de l'apôtre avec des sourires intraduisibles, déclarant qu'ils l'entendraient volontiers une autre fois quand il ne se permettrait pas de commenter des sujets de fiction.
Paul en fut bien naturellement désolé. À ce moment-là, il ne pouvait en conclure que la fausse culture trouverait toujours, dans la véritable sagesse, une expression des choses imaginaires et sans aucun sens. L'attitude d'Aréopage ne lui permettait pas d'aller jusqu'au bout. Bientôt la somptueuse enceinte était presque silencieuse, l'apôtre se dit qu'il serait préférable d'affronter le tumulte des juifs. Là où il y avait de la lutte, il y aurait toujours des fruits à récolter. Les discussions et les heurts représentaient très souvent l'effervescence de la terre spirituelle pour la semence divine. Alors qu'en ces lieux, il avait trouvé la froideur de la pierre. Le marbre des colonnes magnifiques lui avait immédiatement donné une image de la situation. La culture athénienne était belle et très soignée, elle impressionnait par son aspect extérieur magnifique, mais elle était froide et portait la rigidité de la mort intellectuelle.
Seul Denys, une jeune femme du nom de Damaris et quelques serviteurs du palais étaient restés à ses côtés, extrêmement contrariés, bien qu'enclins à sa cause.
Malgré sa déception, Paul de Tarse faisait son possible pour dissiper le nuage de tristesse qui planait sur tout le monde, en commençant par lui-même. Il a esquissé un sourire de résignation et fit quelques remarques avec bonne-humeur. L'admiration de Denys pour les puissantes qualités spirituelles de cet homme d'une apparence fragile, aussi énergique et soucieux de ses convictions, s'en est encore sentie davantage renforcée.
Avant de se retirer, Paul a parlé de la possibilité de fonder une église, même dans le cadre d'un humble sanctuaire domestique où serait étudié et commenté l'Évangile. Mais ceux qui étaient là n'ont pas été avares d'excuses et de prétextes. Denys a affirmé qu'il déplorait ne pas être en mesure de soutenir un tel engagement, étant donné l'angoisse régnante de l'époque; Damaris a allégué des empêchements domestiques ; les serviteurs d'Aréopage, un à un, ont manifesté des difficultés extrêmes. L'un était très pauvre, l'autre incompris, et Paul reçut tous ces refus en gardant une singulière expression physionomique, comme le semeur qui ne se voit entouré que de pierres et d'épines.
L'apôtre des gentils est reparti avec sérénité. Mais dès qu'il fut seul, il pleura copieusement. À qui attribuer ce pénible échec ? Il ne put comprendre sur le coup qu'Athènes souffrait d'empoisonnements intellectuels séculaires, et, se supposant abandonné par les énergies du plan supérieur, l'ex-rabbin a laissé libre cours à son terrible découragement. Il ne pouvait se résoudre à la froideur générale, d'autant que la nouvelle doctrine ne lui appartenait pas mais était celle du Christ. Quand il ne pleurait pas pour sa propre douleur, il pleurait pour le Maître, se disant que lui, Paul, n'avait pas su correspondre à l'attente du Sauveur.
Pendant plusieurs jours, il ne réussit pas à se défaire du nuage d'inquiétudes qui avait assombri son âme, mais s'en remettait finalement à Jésus et suppliait sa protection pour les grandes tâches de sa vie.
Dans cette nuée d'incertitudes et d'amertumes, l'aide du Maître est apparue à l'apôtre bien-aimé. Timothée est arrivé de Corinthe, chargé de lui apporter de bonnes nouvelles.
LES ÉPÎTRES