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Tant que l'on n'avait pas le nécessaire, on ne pouvait s'occuper raisonnablement du superflu. Si l'on n'a pas fait plus, en U.R.S.S. pour la gourmandise, ou pas plus tôt, c'est que trop d'appétits n'étaient pas encore rassassiés.

Le goût du reste ne s'affine que si la comparaison est permise; et il n'y. avait pas à choisir. Pas de «X habille mieux». Force est ici de préférer ce que l'on vous offre; c'est à prendre ou à laisser. Du moment que l'Etat est à la fois fabricant, acheteur et vendeur, le progrès de la qualité reste en raison du progrès de la culture.

Alors, je pense (en dépit de mon anticapitalisme) à tous ceux de chez nous qui, du grand industriel au petit commerçant, se tourmentent et s'ingénient: qu'inventer qui flatterait le goût du public? Avec quelle subtile astuce chacun d'eux cherche à découvrir par quel raffinement il pourra supplanter un rival! De tout cela, l'Etat n'a cure, car l'Etat n'a pas de rival. La qualité?—«A quoi bon, s'il n'y a pas de concurrence», nous a-t-on dit. Et c'est ainsi que l'on explique trop aisément la mauvaise qualité de tout, en U.R.S.S. et l'absence de goût du public. Eût-il «du goût» il ne pourrait le satisfaire. Non; ce n'est plus d'une rivalité mais bien d'une exigence à venir, développée progressivement par la culture, que dépend ici le progrès. En France, tout irait sans doute plus vite, car l'exigence existe déjà.

Pourtant, ceci encore: Chaque Etat soviétique avait son art populaire; qu'est-il devenu? Une grande tendance égalitaire refusa durant longtemps d'en tenir compte. Mais ces arts régionaux reviennent en faveur et maintenant on les protège, on les restaure, on semble comprendre leur irremplaçable valeur. N'appartiendrait-il pas à une direction intelligente de se ressaisir d'anciens modèles, pour l'impression de tissus par exemple, et de les imposer, de les offrir du moins, au public. Rien de plus bêtement bourgeois, petit-bourgeois, que les productions d'aujourd'hui. Les étalages aux devantures des magasins de Moscou sont consternants. Tandis que les toiles d'autrefois, imprimées au pochoir, étaient très belles. Et c'était de l'art populaire; mais c'était de l'artisanat.


*      *      *      *      *


Je reviens au peuple de Moscou. Ce qui frappe d'abord c'est son extraordinaire indolence. Paresse serait sans doute trop dire... Mais le «stakhanovisme» a été merveilleusement inventé pour secouer le non-chaloir (on avait le knout autrefois). Le stakhanovisme serait inutile dans un pays où tous les ouvriers travaillent. Mais là-bas, dès qu'on les abandonne à eux-mêmes, les gens, pour la plupart, se relâchent. Et c'est merveille que malgré cela tout se fasse. Au prix de quel effort des dirigeants, c'est ce que l'on ne saurait trop dire. Pour bien se rendre compte de l'énormité de cet effort, il faut avoir pu d'abord apprécier le peu de «rendement» naturel du peuple russe.

Dans une des usines que nous visitons, qui fonctionne à merveille (je n'y entends rien; j'admire de confiance les machines; mais m'extasie sans arrière-pensée devant le réfectoire, le club des ouvriers, leurs logements, tout ce que l'on a fait pour leur bien-être, leur instruction, leur plaisir), on me présente un stakhanoviste, dont j'avais vu le portrait énorme affiché sur un mur. Il est parvenu, me dit-on, à faire en cinq heures le travail de huit jours (à moins que ce ne soit en huit heures, le travail de cinq jours; je ne sais plus). Je me hasarde à demander si cela ne revient pas à dire que, d'abord, il mettait huit jours à faire le travail de cinq heures? Mais ma question est assez mal prise et l'on préfère ne pas y répondre.

Je me suis laissé raconter qu'une équipe de mineurs français, voyageant en U.R.S.S. et visitant une mine, a demandé, par camaraderie, à relayer une équipe de mineurs soviétiques et qu'aussitôt, sans autrement se fouler, sans s'en douter, ils ont fait du stakhanovisme.

Et l'on en vient à se demander ce que, avec le tempérament français, le zèle, la conscience et l'éducation de nos travailleurs le régime soviétique n'arriverait pas à donner.

Il n'est que juste d'ajouter, sur ce fond de grisaille, en plus des stakhanovistes, toute une jeunesse fervente, keen at work, levain joyeux et propre à faire lever la pâte.

Cette inertie de la masse me paraît avoir été, être encore, une des plus importantes, des plus graves données du problème que Staline avait à résoudre. De là, les «ouvriers de choc» (Udarniks); de là, le stakhanovisme. Le rétablissement de l'inégalité des salaires y trouve également son explication.

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