Читаем Сatherine et le temps d'aimer полностью

Tout autour d'elle, la masse rouge du château s'était fondue dans la nuit. Aucun bruit ne se faisait entendre, hormis, de temps en temps, le pas lent d'une sentinelle ou le cri d'un oiseau nocturne. Elle s'attarda un moment sous les arcades où les azulejos brillaient comme un satin sous la lune, cherchant à analyser les battements désordonnés de son cœur. Puis, songeant que, peut-être, Josse l'attendait déjà dans sa chambre, elle se dirigeait vers l'escalier pour remonter chez elle quand, soudain, le page Tomas de Torquemada surgit de derrière un pilier. La jeune femme sursauta, désagréablement impressionnée par cette habitude qu'il avait d'apparaître ici ou là sans que l'on ait pu l'entendre approcher, comme s'il était le sombre génie de cette demeure seigneuriale. Mais, cette fois, la surprise fut réciproque. En face de la jeune femme environnée du rayonnement lumineux de sa robe, auréolée par ses cheveux d'or simplement relevés sur le front et rejetés en arrière, l'inquiétant garçon se figea, médusé.

Un moment, ils restèrent ainsi, face à face. Catherine vit une expression d'incrédulité envahir la glace pâle du regard immobile, jointe à une sorte de crainte superstitieuse. Les lèvres serrées s'entrouvrirent, mais aucun son n'en sortit. Tomas y passa seulement la pointe de sa langue tandis que ses yeux, soudain étincelants, descendaient le long du cou de la jeune femme, suivaient le dessin du profond décolleté qui plongeait bas, s'attardaient dans la douce vallée des seins dont la soie souple de la robe, serrée sous la poitrine par un lien d'or, moulait les formes parfaites. Visiblement, le garçon n'avait jamais contemplé semblable spectacle, mais, comme il demeurait planté devant elle sans paraître songer à s'écarter, la jeune femme lui adressa un froid sourire tandis que sa main, instinctivement, venait voiler sa gorge.

— Voudriez-vous me laisser passer ? demanda-t-elle.

Au son de cette voix, Tomas sursauta comme s'il sortait d'un songe.

Une sorte de terreur se peignit sur son visage qui, de rouge qu'il était devenu, retrouvait sa tragique pâleur. Il se signa précipitamment plusieurs fois, tendit les bras devant lui comme pour repousser la trop séduisante apparition, puis, criant d'une voix rauque : « Vade rétro Satana !...

», il tourna les talons et s'enfuit à toutes jambes. Les ombres noires de la cour l'engloutirent aussitôt. Haussant les épaules, Catherine poursuivit son chemin. Remontée dans la galerie, elle trouva Josse qui l'attendait devant sa porte, adossé au chambranle, les bras croisés.

— Alors, demanda-t-elle avidement, avez-vous appris qui est ce moine ?

— On l'appelle Fray Ignacio, mais ce n'est pas facile de faire parler les gens de l'archevêque à son sujet. Ils semblent tous en avoir une peur bleue. Je crois bien qu'ils le craignent encore plus que le Maure ou le page noir au visage de mauvais ange.

— Mais d'où vient-il ? Que fait-il ? Depuis combien de temps habite-t-il ce château ?

— Dame Catherine, remarqua Josse calmement, je crois que don Alonso, qui semble beaucoup apprécier votre compagnie, vous renseignerait mieux que moi sur ce personnage étrange car il n'y a guère que lui, ici, qui ait affaire avec Fray Ignacio. Celui-ci s'occupe d'alchimie, de la transmutation des métaux. Il cherche, comme tant d'autres, la fameuse pierre philosophale. Mais, surtout, il est chargé de veiller sur le trésor de l'archevêque, l'extraordinaire collection de pierres précieuses qu'il possède. Un familier de don Alonso m'a dit que Fray Ignacio était un expert en la matière et que... mais, dame Catherine, vous n'allez pas vous trouver mal ?

En effet, la jeune femme, très pâle, avait dû s'appuyer au mur. Le sang quittait son visage et le sol se dérobait sous ses pieds. Josse ne pouvait comprendre à quel point la frappait cette grande science des gemmes que possédait le moine mystérieux. Garin, jadis, avait collectionné les pierres avec passion.

— Non, dit-elle d'une voix blanche. Je suis seulement très lasse.

Je... je ne me soutiens plus !

— Alors, allez vite dormir ! fit Josse avec un bon sourire.

D'ailleurs, je n'en sais pas plus. J'ajoute seulement qu'il est rare de rencontrer Fray Ignacio. Il ne quitte guère les appartements privés de don Alonso où il a son cabinet d'alchimiste et où se trouve la chambre du trésor.

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