Une autre impression, bien autrement amie et restaurante avait été celle-ci: le jour même de mon départ, deux heures avant de monter en voiture, le sort a eu la très aimable attention de me faire parvenir ta lettre du 3 de ce mois. Elle arrivait à point,[26]
car l’attente commençait à tourner à l’inquiétude, et d’ailleurs j’avais besoin d’une récompense pour les 3 jours d’horrible existence que j’allais passer enfermé dans la caisse de la diligence. Cette lettre fut donc la très bien venue, et bien qu’elle fut, ne t’en déplaise, une des plus fraîches et des plus calmes que tu n’eusses jamais écrites, telle est néanmoins l’horrible partialité du cœur humain que je sentais, en empruntant un chiffon du papier, qu’il m’était plus cher que tout ce que je laissais derrière moi. Et cependant c’est un monde bien uni, bien sympathique que celui que je quittais. Les adieux de mes bons vieux ont été des plus tendres, et ceux de ma mère en particulier m’ont été presque pénibles. Un certain degré de sensibilité maintenant, presque dans la vieillesse, devient un contresens. Toute la famille m’a accompagné jusqu’au bureau des diligences, et l’apparition de ma mère dans un pareil endroit était un fait sans précédant et sans analogue dans sa vie. Je n’ai pas besoin de te dire que dans la matinée du jour de mon départ qui était un dimanche il y a eu après la messe le