Том 6. Письма 1860-1873

A mon retour^*, c’est Иов lui-même qui a pris l’initiative des explications et m’a avoué qu’en effet l’état de complète ivresse, où il se trouvait, qui a occasionné la ridicule alerte qui a amené l’intervention de la police, mais il m’a confié en même temps que ce sont ses chagrins domestiques qui l’avaient poussé à cet accès d’intempérance, — j’ai accepté toutes ces explications, et comme j’ai retrouvé en lui le même individu correct et convenable que par le passé, il m’a été facile de passer l’éponge sur un fait anormal, dont je n’ai pas été témoin, etc. etc. C’est donc un incident considéré comme non avenu, à condition qu’il ne se renouvelle pas…^*

J’ai eu dernièrement la visite de ce malheureux Othon^* qui fait peine à voir… C’est un homme écrasé, et il a suffi pour cela qu’une fois dans sa vie il se trouvât placé, face à face, avec la réalité… En un mot, il s’est vu tel qu’il est. C’est tout dire. Sa femme, en le quittant, lui a brutalement déclaré qu’elle ne l’a jamais aimé, ni ne pourrait jamais l’aimer, et depuis leur séparation elle ne lui donne plus signe de vie… J’avais à lui remettre une petite collecte de 75 rbles de la part de ses sœurs, et c’était là l’unique consolation que j’ai eu à lui offrir.

Hier je suis allé présider mon Comité. J’avais déjà précédemment vu Похвиснев le jour même de mon retour, et j’ai pu annoncer à ces messieurs que la question de l’avancement, au moins quant au principal intéressé, avait été résolue dans le sens de leurs vœux. J’ai trouvé là l’ami Polonsky qui m’a conté l’incident qui vient d’avoir lieu chez lui: une bonne qui est au service du ménage, l’autre jour, en traversant la rue, a été mordue au pied par un petit chien enragé. Cela m’a rappelé les appréhensions de ma pauvre mère, qui nous paraissaient si excentriques, et qui, après tout, n’étaient que raisonnables…

La saison ici s’est un peu modifiée, il a plu ces jours-ci, mais le fond de l’air est toujours encore chaud, et aujourd’hui le soleil semble vouloir prendre le dessus. Aussi je compte en profiter, pour aller dans la journée à Krestovsky, faire une visite à la petite Lise^*

, dont c’est la fête aujourd’hui. Hier elle m’a décoché un petit billet tout aimable, pour m’annoncer sa prochaine apparition chez moi, tout en m’exhortant à me faire transporter chez elle, et me cite l’exemple de Chateaubriand qui, pendant des années, dit-elle, a fait la joie de ses amis du fond de sa chaise roulante… Eh bien, non, je n’aimerais pas à faire la sienne dans cette posture-là…

Je voisine toujours très intimement avec l’excellent Delianoff et dîne chez lui avec des professeurs et autres gens de cette espèce… qui en valent bien d’autres.

D’ailleurs rien de nouveau. L’Empereur sera le 15 à Varsovie et est attendu ici pour le 22…

^* Mais il serait bien temps que je reçoive une lettre de vous, qui me redonne un peu de conviction…

Перевод

Петербург. 5 сентября <18>68

Милая кисанька. Тешу себя надеждой, что моя телеграмма подоспела в нужную минуту, чтобы смягчить впечатление, которое могло произвести на вас письмо, отправленное мною из Москвы накануне моего отъезда… Мне значительно лучше, и я уже обрел благодатную способность спускаться с лестницы собственными стараниями, вместо того чтобы заставлять сносить себя вниз на руках, как мне приходилось делать до сих пор… Нынче я снова обуюсь в обычные человеческие сапоги… Еще несколько дней, и ко мне вернется моя всегдашняя подвижность…

По моем возвращении^* Иов сам явился ко мне с объяснениями и признался, что виною нелепой потасовки, завершившейся вмешательством полиции, действительно было состояние сильнейшего опьянения, в котором он тогда находился, но в то же время он доверительно мне поведал, что довели его до такого припадка буйства нелады в семействе, — я выслушал все это и, видя перед собой ту же пристойную и смирную личность, какой он представлялся мне прежде, с легкостью простил ему эту выходку, при коей не присутствовал, и т. д. и т. п. Итак, будем считать, что ничего не случилось, если только подобное не повторится…^*

Намедни меня посетил несчастный Оттон^*, на которого жалко глядеть… Это сломленный человек, и, чтобы дойти до такого состояния, ему было достаточно раз в жизни посмотреть в лицо действительности… Одним словом, он увидел себя таким, какой он есть. Этим все сказано. Его жена, прощаясь с ним, заявила ему без обиняков, что никогда его не любила и никогда не смогла бы полюбить, и с тех пор, как они расстались, он не имеет от нее никаких вестей… Я передал ему 75 рублей, скромное вспомоществование, собранное для него сестрами, и это было единственное утешение, которое я мог ему предложить.