Puis ils étendirent Boromir au centre de la barque qui devait l’emporter sur l’eau. La cape et le capuchon gris offerts par les Elfes, ils les plièrent et les placèrent sous sa tête. Ils peignèrent ses longs cheveux sombres et les disposèrent sur ses épaules. La ceinture dorée de Lórien luisait à sa taille. Son heaume ils posèrent à son côté, et placèrent sur ses genoux le cor fendu, ainsi que la poignée et les fragments de son épée ; à ses pieds, ils entassèrent les lames de ses ennemis. Puis, ayant attaché la proue à la poupe de l’autre embarcation, ils le firent glisser dans l’eau. Ils ramèrent tristement le long du rivage, et, entrant dans le chenal aux eaux vives, ils passèrent la verte pelouse de Parth Galen. Les flancs escarpés de Tol Brandir rougeoyaient : on était à présent en milieu d’après-midi. À mesure qu’ils descendaient au sud, les vapeurs du Rauros s’élevaient, miroitantes, devant eux, tel un nuage doré. Le vrombissement et le tonnerre des chutes agitaient l’air immobile.
Ils détachèrent, affligés, la barque funéraire : Boromir reposait là, tranquille, paisible, glissant dans le giron du cours d’eau. Le courant l’emporta, tandis qu’ils retenaient leur propre embarcation à l’aide des pagaies. Boromir les dépassa et sa barque s’éloigna lentement, bientôt réduite à une tache noire dans la lumière dorée ; puis, soudain, elle disparut. Le rugissement du Rauros se poursuivit, impassible. Le Fleuve avait pris Boromir fils de Denethor ; et on ne le revit plus à Minas Tirith, dressé au sommet de la Tour Blanche tel qu’on avait coutume de le voir au matin. Mais on raconta longtemps, dans la tradition du Gondor, que la barque des Elfes passa les hautes chutes et leur bassin d’écume, et qu’elle le porta à travers Osgiliath, et au-delà des multiples bouches de l’Anduin jusqu’à la Grande Mer, nuitamment, sous les étoiles.
Les trois compagnons demeurèrent silencieux un moment, le suivant du regard. Puis Aragorn prit la parole. « Ils guetteront sa venue du haut de la Tour Blanche, dit-il ; mais il ne reviendra ni par la montagne, ni par la mer. » Puis il se mit à chanter lentement :
Alors Legolas chanta :
Puis Aragorn reprit :