103 683e et 4000e ont quitté depuis des jours le nid des tisseuses rouges. Deux guerrières au dard pointu les accompagnent. Ensemble elles ont marché longtemps sur des pistes à peine parfumées de phéromones pistes. Elles ont déjà parcouru des milliers de têtes de distance depuis le nid tissé dans les branches du noisetier. Elles ont croisé toutes sortes d'animaux exotiques dont elles ne connaissent même pas le nom. Dans le doute, elles les évitent tous.
Quand la nuit vient, elles creusent la terre le plus profondément possible puis s'enfouissent en profitant de la douce chaleur et de la protection de leur planète nourricière.
Les deux rouges, aujourd'hui, les ont guidées jusqu'au sommet d'une colline.
Le bout du monde est encore loin?
C'est par là.
De leur promontoire, les rousses découvrent, à perte de vue vers l'est, un univers de sombres broussailles. Les rouges leur signifient que leur mission prend fin,
qu'elles ne les suivent pas plus loin. Il y a certains endroits où leurs odeurs ne sont pas bien accueillies.
Le Belokaniennes doivent continuer tout droit jusqu'aux champs des moissonneuses. Celles-ci vivent en permanence aux parages du «bord du monde»; elles sauront sans aucun doute les renseigner. Avant de quitter leurs guides, les rousses délivrent les précieuses phéromones d'identification de la Fédération, prix convenu du voyage. Puis elles dévalent la pente à la rencontre des champs cultivés par les fameuses moissonneuses.
Les esclavagistes attaquent! Panique à Chli-pou-kan. Des éclaireurs fourbus répandent la nouvelle dans la jeune cité.
Les esclavagistes! Les esclavagistes! Leur terrible réputation les a précédées. De même que certaines fourmis ont privilégié telle voie de développement - élevage, stockage, culture de champignons ou chimie -, les esclavagistes se sont spécialisées dans le seul domaine de la guerre. Elles ne savent faire que ça, mais le pratiquent comme un art absolu. Et tout leur corps s'y est adapté. La moindre de leurs articulations se termine par une pointe recourbée, leur chitine a une épaisseur double de celle des rousses. Leur tête étroite et parfaitement triangulaire n'offre de prise à aucune griffe. Leurs mandibules, aux allures de défenses d'éléphant portées à l'envers,