Sire! daignez lire notre justification et jetez un coup d’œil sur notre activité. Faites Vous donner le rapport de Klinger après son voyage ici. Et encore dans ce rapport ne verrez Vous que les résultats de nos efforts pour réaliser Vos vues. Vous n’y verrez pas les désagréments, les combats, les dégoûts continuels que ces résultats nous ont coûtés. Et malgré ces efforts continuels à faire notre devoir nous devons perdre les bonnes grâces de notre seul protecteur parce qu’un homme comme Richter chargé des gémisseurs de toute la province nous hait! Sire! Rien de plus facile à l’Université que de faire ses devoirs en apparence, d’être irréprochable dans le sens du Gouv. Richter et de ses semblables; des visites chez les grands, des rapports et des tabelles, quelques punitions bien éclatantes de quelques étudiants, et surtout la négligence totale de ses vrais devoirs – voilà ce qu’il faut pour se concilier ces gens-là. Sire! Sire! Vous savez Vous-même que partout il n’existe que des formes; conservez l’institut
Votre Parrot.
Il Vous est resté fidèle, il le sera jusqu’au dernier soupir.
P. S.
Une lettre que j’ai reçue récemment de l’Allemagne fait présenter une campagne prochaine sur la Vistule. Ne faites pas passer Votre armée en Suède. Concentrez Vos forces sur notre côté.
137. Alexandre IER
à G. F. ParrotQuand j’ai des torts j’aime à en convenir. C’est mon cas vis-à-vis de Vous et j’en possède toutes les preuves; aussi je m’empresse de réparer mon injustice et de Vous l’avouer avec franchise. J’espère éviter à l’avenir des cas semblables. En attendant, je joins ici ce que Vous m’avez demandé2
et je regrette vivement toute la peine que j’ai pu Vous causer.Recevez l’assurance de mon estime qui Vous a été vouée depuis longtemps et qui n’a fait que s’accroître par ce que vient de se passer entre nous.
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138. G. F. Parrot à Alexandre IER
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Me voici rentré chez moi, mon Bien-Aimé, mon digne Alexandre! Je veux employer les premiers moments après Votre passage pour Vous dire quelques mots que j’aurais tant désiré Vous dire de bouche; je comptais que Vous mettriez pied à terre; j’étais si gêné, si peiné de ne pouvoir Vous ouvrir mon cœur. J’étais obligé même de contenir ma physionomie, car le chambellan Osarovsky m’a remis ce matin Votre lettre à la station en présence de toute l’Université qui Vous attendait et d’autres personnes, et je savais que j’étais observé.
Sentez-Vous combien Vous m’avez rendu heureux par Votre lettre? O combien elle m’est chère! Je Vous l’avoue, j’étais en doute. Ma raison me disait que Vous Vous étiez éloigné de moi et je ne savais que lui répondre. Mais mon cœur me répétait sans cesse que cela est impossible. O que je suis heureux que mon cœur a eu raison!
Je relis Votre lettre. Alexandre! Votre âme est noble, élevée. Oui, elle ferait mes délices, cette lettre, fût-elle adressée à un autre qu’à moi. Lire dans une âme comme la Vôtre est une grande jouissance, mais y lire comme j’y lis, mon Bien-Aimé, c’est la plus grande de toutes. – Je puis donc continuer de Vous aimer sans me reprocher de faiblesse, sans paraître ridicule à mes propres yeux, je puis sans rougir abandonner mon cœur à mon sentiment qui lui est devenu nécessaire. Mon âme Vous suit sur Votre route. Que ne puis-je Vous suivre en effet! – J’ai une bien forte raison de le désirer, plus forte que lorsque Vous partîtes pour la Moravie. – Relisez cette dernière ligne et pesez-la, je Vous en conjure.