Je relis encore Votre lettre et je suis tenté de m’accuser d’ingratitude. Pendant le peu d’instants que je Vous ai vu je Vous ai dit un mot qui Vous a fait de la peine. Combien cela m’en a fait à moi-même! Mais pouvais-je Vous cacher la vérité? Oui, il est malheureusement vrai que nous avons 25 étudiants moins que le semestre passé, et d’après les nouvelles que nous avions reçues des provinces nous en devions avoir au moins 20 de plus. C’est une partie bien considérable pour l’Université et pour Vous-même. Vous en avez senti la cause. Détruisez cette cause. Rendez aux Statuts, à la constitution que Vous nous avez données leur vigueur naturelle. Les lois suffisent, croyez m’en. Je ne suis pas prévenu; mon sentiment moral ne me permet pas de l’être dans cette affaire. Croyez que je tiens plus aux mœurs des étudiants que ceux qui Vous indisposent contre eux. Je vois de près, Vous de loin; je vois par mes propres yeux, Vous par les yeux de nos ennemis. La haine qu’on nous porte ne meurt pas. Je croyais il y a quelque temps qu’elle s’affaiblissait. Mais Vous-même m’avez averti du contraire. Là Vous pouviez voir par Vos propres yeux, et l’expérience – cette indigne manœuvre du Gouverneur Richter m’a trop bien prouvé que Vous aviez raison. Notre Ministre Vous a-t-il présenté nos remontrances? Avez-Vous reçu ma lettre du 28 juin? Si Vous n’avez reçu ni l’une ni l’autre, agissez par confiance en moi. Retirez l’ordre que Vous avez donné, sur ma parole. (Si pendant Votre voyage un étudiant se trouvait arrêté à tort ou de droit, qui déciderait de son sort? Devrait-il rester enfermé avec les soldats que jusqu’à Votre retour?) Votre confiance en moi Vous a-t-elle jamais abusé? Je suis encore Votre Parrot; dans un sens je le serai toujours, et je n’ai d’autre vœu que de l’être de tout sens. L’Université de Dorpat est Votre ouvrage. C’est ce qui m’attache à elle si fortement; sans cette idée je Vous eusse déjà demandé une autre place, où je n’eusse aucun point de contact avec la noblesse du cercle de Dorpat et avec les Richter.
Je Vous remercie au nom du cultivateur Livonien pour avoir terminé sa constitution1
. Ç’a été la première lueur qui a frappé mon cœur dans la nuit qui l’entourait. J’ai partagé la joie de notre Sivers. – De notre Sivers! Lorsqu’il m’a écrit cette nouvelle il avait oublié qu’il est ruiné et que Vous n’avez pas encore réparé les torts que son invincible amour des hommes a fait à sa fortune. Il était heureux. La Couronne peut-elle être une jouissance à mon Alexandre s’il ne saisit pas l’occasion de répandre ses bienfaits sur un homme comme Sivers, tandis que l’importunité lui arrache tant de dons?Dieu veille sur Vous – sur Vos jours! Retournez – heureux et satisfait! Je Vous ai dit bien des choses dans cette lettre. Je sens qu’il faudrait un commentaire. Si j’étais bien sûr que Vous la receviez je Vous ferais ce commentaire. Écrivez-moi deux mots je Vous en supplie; dites-moi s’il Vous faut un commentaire.
Votre Parrot, Tout entier Votre Parrot
139. G. F. Parrot à Alexandre IER
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Il n’y a que 10 jours que je Vous ai écrit1
, Mon Bien-Aimé, et voici déjà une seconde lettre. Ne Vous fâchez pas de mon importunité; le sujet est très important. Il Vous regarde personnellement et l’Université. Plusieurs gazettes ont annoncé que Vous avez promis au Duc de Weimar de permettre aux Livoniens et Courlandais de faire leurs études à l’Université de Jena2, et le public explique cette permission comme dérogeant au § 17 de l’acte de fondation de l’Université de Dorpat en vertu duquel quiconque veut obtenir un emploi qui suppose des connaissances scientifiques doit avoir étudié trois ans à l’Université de Dorpat ou à une autre université de l’Empire russe.