J’ai recu, cher papa, vos deux derni`eres lettres et je ne puis vous dire, combien j’ai 'et'e touch'e de la bont'e que vous avez eu de prendre soin de notre 'etablissement futur `a Moscou. D’autre part, la d'epense que vous aviez faite pour nous mettre en possession d’un logement, me contrarie un peu. Car, de la mani`ere dont les choses se sont engag'ees ici, je ne pr'evois pas `a quelle 'epoque je pourrai m’en aller d’ici. Voici ce qui eusse. J’ai vu la semaine derni`ere le Vice-Chancelier et l’accueil qu’il m’a fait a de beaucoup surpass'e mon attente. Je ne sais si je vous ai 'ecrit que l’ann'ee derni`ere nous avions 'et'e en rapports suivis et que plusieurs de mes lettres, relatives aux affaires du jour avaient 'et'e mises tant sous ses yeux que sous les yeux de l’Empereur*
. Aussi apr`es un quart d’heure de conversation sur ce qui avait 'et'e le sujet de notre correspondance, il m’a fut obligeamment demand'e, si je ne consentirai pas `a rentrer au service. Comme j’avais de longue main pour cette question, je lui ai dit que oui et comment j’entendais `a y rentrer. Il m’a alors demand'e de prolonger mon s'ejour `a P'etersbourg, en me disant qu’il reconnaissait, qu’il y avait quelque chose `a faire, qu’il y penserait et que sous peu j’aurai de ses nouvelles. En un mot et pour abr'eger les 'ecritures que je fais, j’ai 'et'e enti`erement satisfait de cette entrevue, moins encore dans mon int'er^et personnel, que dans l’int'er^et de la chose qui seule m’int'eresse.Ces jours-ci j’ai fait aussi la connaissance de la Comtesse de Nesselrode*
qui a 'et'e pour moi d’une gracieuset'e et d’une amiti'e peu commune. C’est chez le Pce Wiasemsky que je l’ai rencontr'ee. Nous 'etions `a quatre, les deux Wiasemsky, elle et moi, et nous ne nous sommes qu’`a 3 heures du matin. Le surlendemain elle m’a invit'e chez elle, et l’accueil qu’elle m’a fait a 'et'e des plus gracieux. C’est une femme de beaucoup d’esprit et parfaitement aimable pour les gens qui lui plaisent. Je supprime les d'etails, car dans une lettre cela aurait l’air de comm'erage. Mais ce que je ne puis passer sous silence, c’est l’amiti'e que le Prince Wiasemsky me t'emoigne en toute occasion. Le plus proche parent ne pourrait pas mettre plus de z`ele et empressement `a servir mes int'er^ets qu’il ne le fait.J’ai retrouv'e ici encore un z'elateur
. C’est L. Narischkin*, l’aide de camp g'en'eral. J’ai 'et'e le voir au jour de son retour de Gatchina, et il m’a dit qu’ayant lu par hasard une brochure que j’ai publi'ee l’'et'e dernier en Allemagne*, il en avait, suivant son habitude, parl'e `a tout le monde et avait finalement r'eussi `a la faire lire `a l’Empereur qui, apr`es l’avoir lue, a d'eclar'e qu’il y retrouvait toutes ses id'ees et a paru curieux de savoir qui en 'etait l’auteur. Je suis assur'ement tr`es flatt'e de cette co"incidence, mais par des motifs qui, puis-je le dire, n’ont rien de personnel.J’aurais encore une foule de choses `a ajouter sur ma position actuelle `a P'etersb, mais ce sera pour une autre fois. Adieu, chers papa et maman. Comme nous avons d'em'enag'e, vous aurez la complaisance d’adresser vos lettres, ainsi qu’il suit.
На Английской набережной, в доме Маркевича, у г-жи Бенсон
.Перевод
Петербург. 27 октября