Je dois des actions de grâces au Bien-Aimé pour l’ordonnance en faveur des étudiants qui se vouent au militaire1
, et mon cœur Lui en offre l’hommage avec ce sentiment ineffable que le Bien-Aimé seul sait inspirer. Mais cette ordonnance contient un point qui rend au jeune homme malheureux, le point qui restreint cette faveur à la classe des gentilhommes. L’étudiant Goers, qu’Elssner déclare être son meilleur élève, qui a terminé ses études militaires sur la parole que le curateur nous donna il y a un an et demi, se trouve à Pétersbourg, dénué de tout moyen pour entrer dans sa carrière parce qu’il n’est pas gentilhomme, toutes les portes lui sont fermées. Il va tous les jours à la parade pour tâcher d’attirer l’attention de son souverain et trouver l’occasion de Vous offrir le tableau de sa situation. Son père, sexagénaire et pauvre, qui avait fondé sur lui l’espérance de sa vieillesse, mourra de chagrin s’il apprend qu’après avoir épuisé son peu de ressources pour former son fils, il n’a fait que le soumettre pour 12 ans au traitement avilissant auquel les bas-officiers bourgeois sont sujets. Et ce jeune homme n’est pas le seul dans ce cas. – En France, Sire, dans le temps où les prérogatives de la noblesse étaient dans toute leur vigueur, on a toujours fait une exception pour l’artillerie et le génie. Quiconque avait du talent et des connaissances y était admis, et Vous savez mieux que moi combien cette partie du militaire français avait de prépondérance en Europe. Je sais, ô mon Bien-Aimé, combien cette restriction a dû Vous coûter, à Vous qui me dites la première fois que Vous m’accordâtes le bonheur de Vous voir: «Je travaille à égaliser les conditions dans mon Empire»2.La noblesse de Livonie s’est déclaré à l’égard des écoles paroissiales. J’ai cette déclaration sous les yeux. Elle contient que le plan est impraticable faute de maîtres d’écoles, les pasteurs et les marguilliers ne pouvant se charger de cet emploi; on appuie sur le sentiment du consistoire, que l’Université ne peut pas avoir l’inspection de ces écoles, mais qu’elles doivent rester au consistoire; que la noblesse est trop pauvre pour fournir les frais; que l’on ne peut pas imposer le paysan; que tout doit être remis au patriotisme des particuliers; et pour preuve de ce patriotisme on cite l’école de la paroisse de Canapäh.
Voici en peu de mots ma réponse: Les marguilliers ont jusqu’à présent fait les doubles fonctions et Vous fournissez les frais pour les former à cet emploi. Je me suis arrangé depuis avec le surintendant général pour éviter les collisions d’autorité. Le consistoire et les pasteurs ne pourront pas mettre les écoles paroissiales en vigueur, parce qu’ils sont trop dépendants de la noblesse, dont le patriotisme a toujours contrarié l’instruction au paysan. Le plan n’exige de la noblesse que des maisons pour y établir les écoles et des hommes pour en faire des précepteurs. Or j’ai les ordonnances anciennes, du temps de l’Impératrice Catherine, et elles sont plus rigoureuses que le plan, il suffit de les mettre en vigueur3
. Dans les cercles de Riga, Wenden et Wolmar, le paysan s’est offert volontairement à l’entretien des écoles paroissiales. L’école de la paroisse de Canapäh a été établie il y a 2 ans conformément à mon plan par le pasteur Roth,