J’avais espéré au mot de la part du Bien-Aimé sur ma dernière lettre du 8 septembre. Mon espérance a été vaine. Vous sentez sûrement que je dois souffrir de cette cruelle incertitude, et Vous ne voulez pas que je souffre. Il me reste une lueur d’espérance, c’est que Vous avez hésité de me répondre parce que les postes ne sont pas sûres. Je sens que Vos lettres ne doivent pas être profanées. Mais en le remettant à Gessler elles me parviendront sûrement par le canal de Klinger. Veuillez, je Vous supplie, me tirer de peine.
Sivers, notre pauvre Sivers se morfond à Pétersbourg à attendre la décision sur l’affaire des paysans. Il se ruine en attendant, ou plutôt il est ruiné par les dépenses énormes pour sa fortune, que ces voyages lui ont causées. Cette année de disette qui le met hors d’état de payer les rentes de ses dettes le culbute entièrement, et sa terre va être saisie par la caisse de crédit pour laquelle il a tout fait1
. Vous aviez ordonné autrefois qu’il recevrait une arrende, qui l’eût sauvé. Il ne l’a pas reçue; Vous ne l’aviez pas cru lorsque je Vous en avertis il y a un an. À présent sa ruine en est la preuve.Sivers a témoigné de tout temps le plus grand désintéressement. Tous les voyages et séjours qu’il a fait à Pétersbourg sont à ses frais. Autrefois il a eu la générosité de refuser les remboursements quand il travaillait à l’avantage de la noblesse qui a toujours eu tant de demandes à faire sous tous les règnes. À présent qu’il travaille pour le paysan on se garde de lui offrir des remboursements tandis que les ennemis
Adieu, mon Alexandre! Je ne puis renoncer à Vous nommer ainsi. Mon sentiment pour Vous est trop profond.
Votre Parrot
132. G. F. Parrot à Alexandre IER
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Sire!
Le Directoire de l’instruction publique a décrété malgré les protestations de Klinger de Vous présenter un plan pour le gymnase de Mitau qui change ce gymnase en une Académie qui sera en même temps Gymnase et Université avec les prérogatives des universités1
. Votre plan général d’instruction publique, qui a été universellement applaudi par toute l’Europe savante, va recevoir par là une atteinte, la plus sensible qui puisse lui être portée.Fatigué des sollicitations qu’on faisait pour ce gymnase Vous avez enfin permis cet hiver qu’on lui accorde quelques-uns des privilèges du gymnase ci-devant. À présent on lui accorde non seulement tout, mais même davantage puisqu’on veut lui donner même l’inspection de toutes les écoles du gouvernement afin que ces demi-professeurs sous la tutelle de la noblesse contrarient l’Université dans l’établissement des écoles paroissiales.
Vous avez les plus fortes raisons de ne pas signer un plan pareil; je Vous les ai alléguées autrefois au long; Vous les avez trouvées justes. Permettez-moi de Vous en offrir l’extrait.
1) Ces instituts hermaphrodites qui doivent servir de gymnase et d’université ne peuvent par leur nature remplir ni l’un ni l’autre but. On propose dans ce plan 15 professeurs qui doivent enseigner les sciences préliminaires et les hautes sciences. Dans les gymnases il y en a 6 pour les sciences préliminaires et dans notre Université 28 pour les sciences supérieures. Par conséquent la jeunesse ne pourra y recevoir pas la moitié de l’instruction nécessaire pour des études en règle.
2) Cet institut dépourvu des collections et appareils nécessaires pour les hautes sciences ne pourra que raconter, non faire voir ce qui constitue ces sciences, ou il faudra lui procurer ces appareils, lui bâtir les bâtiments nécessaires etc. – Notre Université a pour au moins 100 000 Roubles d’appareils sans compter les bâtiments.